C’est une drôle de région que la Navarre. Déjà parce que personne ne sait vraiment où ça se situe, ou pire qu’elle existe. A Montpellier, au mieux, on connaît l’expression de « France et de Navarre ». Une formule qui tire son origine de l’ancien Royaume de Navarre et qui sonne comme un rappel de la spécificité de ce territoire.
D’ailleurs en Espagne, comme lègue de cette longue période
d’indépendance, le droit y est légèrement différent. Petit exemple : au niveau de l’héritage, il y est possible de répartir comme on le souhaite ses biens suite à son décès, il n’y a aucun minimum légal à verser à ses enfants.
Eh oui, Johnny, il n’y avait pas besoin de partir jusqu’aux USA la solution à tes
problèmes se situait à quatre heures en train de Paris.
Blague à part, assez étrangement, cette petite région coincée entre le Pays Basque et l’Aragon, n’attire que très peu de touristes hormis quelques pèlerins en route sur le chemin de Compostelle et des frontaliers en mal de week-end à moindre frais.
Je le sais car pendant sept mois, j’ai effectué mon volontariat CES là-bas en travaillant plus ou moins en tant que serveur et je n’ai pas eu souvent l’occasion de parler anglais ou français. C’est plutôt la maîtrise du basque qui m’aurait bien aidé, parce que oui, en Navarre, on parle Basque.
« Agur », « Egun on », « Kafe esne bat » et autre « Kaixo » ont fait une entrée fracassante dans mon vocable quotidien. Pour essayer de décrypter les
demandes de mes clients, pas d’autre solution donc que de commencer à prendre des cours avec ma collègue volontaire italienne. Mais n’espérez pas obtenir un niveau B1 en quelques mois, l’Euskera reste un mystère pour les linguistes qui ne trouvent aucune racine commune avec les autres langues
européennes. Indomptable à l’image de ses habitants, l’Euskera répond à des règles que seuls les natifs de la région semblent comprendre.
Mais pas d’inquiétude, s’il vous prend l’envie de faire un tour du côté de Pampelune, la maîtrise de l’espagnol suffira largement et vous ne commettrez pas un incident diplomatique en saluant votre interlocuteur avec un simple «hola ». Car si j’ai dû me frotter à la langue locale c’est parce que j’ai effectué mon volontariat dans un tiers-lieu appelé « Geltoki » littéralement « gare » en basque, où la protection de l’Euskera était un fer de lance. Comme son nom l’indique, Geltoki s’est implanté en 2018 dans la friche laissée par l’ancienne gare routière avec pour objectif de promouvoir le réseau d’économie sociale et solidaire de Navarre et l’agriculture locale.
L’espace s’articule entre un café-restaurant, une boutique (de produits écologiques et locaux, de livres et de mode de seconde main) et un long couloir où s’organisent tout au long de la semaine des conférences, des dégustations, des concerts, des spectacles. Concrètement, ma mission était de participer au bon fonctionnement de tout ce jaleo. Je pouvais travailler une matinée à la librairie, le midi faire serveur au restaurant, passer l’après-midi à monter la scène pour les concerts à venir.
En plus de tout ça, j’ai participé au lancement d’un nouveau service pour les usagers : « la trastoteka », qui se traduirait plus ou moins en babiolethèque. L’idée est de créer une bibliothèque d’objet du quotidien, ces petits trucs dont on a besoin, qu’on n’a pas et qu’on finit par acheter pour un ou deux usages.
Véritable caverne d’Ali Baba, on y trouve de tout : des tronçonneuses, des béquilles, une poêle à paella géante, des jeux de sociétés et même une imprimante 3D. Les prêts sont prévus pour une durée de 7 jours et le prix varie
entre 1 et 3€. Une fortune.
En m’attardant sur ces détails, j’en oublierais presque l’essentiel : vous faire partir en vacances en Pampelune cet été.
Oui, oui, il s’agit en fait d’un post déguisé de l’office de tourisme local. Vous l’avez compris maintenant la Navarre c’est totalement WTF alors c’est très logiquement qu’on y trouve au nord des grandes étendues verdoyantes digne des forêts canadiennes (Cascada de Xorroxin, Valle de Baztan, Selva de Irati) et au sud les paysages désertiques du parc naturel des Bardenas Reales sorte de Ayers Rock espagnol qui vous permet de faire croire à vos amis que vous êtes en road-trip en Australie. Le site à même servi de lieu de tournage pour Game of Thrones.
Et pour rester dans l’ambiance médiévale, le château de Olite parfaitement restauré à la moitié du XXe siècle n’a rien à envier aux meilleures bâtisses de films de cape et d’épée, dans la même vibe les villages pittoresques de Ujué ou de Puente de la Reina valent le détour.
Le territoire navarrais est aussi horriblement montagneux (le Moncayo et la mesa de los Tres Reyes culminent à plus de 2000m) ce qui réjouira les fans de randonnées, de ski et d’escalade. C’est d’ailleurs le sport régional numéro 1, devant le foot et son club de Pampelune, Osasuna. Si bien que la mode à Pampelune est un poil différent de ce qu’on à l’habitude de voir à Montpellier, la boutique la plus en vogue s’appelle Decathlon, les jeunes n’hésitent pas à sortir boire des coups en pantalons de randonnées et des chaussures Salomon, Hoka ou Merell au pied.
Alors pour ceux qui souhaitent visiter la Navarre sans risquer un choc stylistique, il est possible de la voir tout en restant en France en se rendant en Basse-Navarre : Saint-Etienne-de-Baïgorry ou Saint-Jean-Pied-de-Port sont de bonnes options.
PS : faire un post sur Pampelune et la Navarre sans évoquer une seule fois la San Fermín relève presque de l’exploit tant toute la ville tourne autour de cet événement. Mondialement connues les fêtes de Pampelune sont l’un des lieux saints de la tauromachie, les images de son spectaculaire encierro finissent chaque année dans les JT français. Cependant, à moins que vous ne connaissiez des gens sur place, je vous déconseillerais de vous y rendre. Car c’est aussi le théâtre de beuveries géantes, d’une hausse des prix généralisées et les français y ont une terrible réputation. Puis si vous avez bien suivi vous le savait déjà, la Navarre a bien trop à offrir pour être réduit à deux semaines de fêtes en plein milieu de juillet.