Charles Robinson, qui sera sur la commune de Lattes en résidence de création littéraire Lattara, jusqu'à la Comédie du Livre de Montpellier à laquelle il participera, est venu découvrir le quartier de la Paillade, accompagné par Nourdine Bara. L'auteur est venu à i.PEICC pour un moment d’arpentage autour de son ouvrage Fabrication de la guerre civile.
La lecture collective a très vite ouvert la voie à un échange riche, vivant, parfois traversé de débats, toujours ancré dans les réalités sociales, politiques et humaines. Un moment type d’éducation populaire : des voix qui se croisent et des vécus qui s’expriment.
Des personnages récurrents, des tresses narratives
Dans Fabrication de la guerre civile et un autre roman antérieur, Charles Robinson met en scène environ 150 personnages, aux surnoms singuliers. Ces deux livres se répondent, et certains personnages y réapparaissent, permettant une reconnexion immédiate à leur univers. Ce choix d’écriture permet d’ancrer des repères sensibles et imaginaires, loin des étiquettes figées des prénoms.
Il parle de « tresses narratives » : des fils entrecroisés, des personnages qui reviennent par grappes, sans forcément de lien direct, mais qui activent la mémoire du lecteur, enrichissent la lecture et donnent une profondeur au récit.
Fiction ancrée, écriture documentée
L’histoire se déroule dans un lieu fictif : la Cité des Pigeonniers. Pourtant, elle puise largement dans le réel. L’auteur l’a construite à partir de mois de récoltes : souvenirs, situations, visages, dialogues… Initialement centré sur un personnage féminin, le récit s’est ensuite élargi à une multiplicité de trajectoires, de voix, de contradictions.
Charles Robinson se définit comme un auteur de romans politiques et sociaux, mais à travers l’imaginaire. Pour lui, la fiction permet de déplacer le regard, de retrouver une forme de lucidité face à une réalité saturée d’informations, souvent épuisante. Il parle d’une « lucidité noire », traversée par une énergie, une poésie, un humour qui sont autant de manières de résister, de parler du monde autrement.
Langage, humour et expérimentations
L’humour, dans son roman, s’exprime dans le langage, les tournures, les inventions, avec un regard attentif à la façon dont on parle dans les quartiers, et une volonté de se réapproprier le langage pour en faire une matière poétique. L’écriture est aussi pensée comme un travail de composition : fragments de vie, rythmes, trajectoires… L’idée n’est pas de livrer une narration classique, mais de construire une expérience de lecture, qui fasse écho à la complexité du réel, sans pour autant perdre le lecteur.
Partager l’œuvre, faire société autrement
Charles Robinson n’écrit pas pour une cible précise. Il parle de « littérature de comète » : un livre qui touche par-ci par-là, qui traverse des publics différents. Il cherche à faire circuler son œuvre dans des espaces variés : cités, MJC, lieux associatifs… avec cette question en toile de fond : comment partager une œuvre avec celles et ceux pour qui elle fait sens ?
Ce moment d’échange à i.PEICC a aussi permis d’ouvrir sur des réflexions collectives autour de la dés-adhésion à la société, de la légitimité des lois, des espaces de révolte, ou encore du rôle des jeunes générations dans les mobilisations.
Des discussions vives, où toutes celles et ceux qui le souhaitaient ont pu confronter ses expériences et ses ressentis, dans un climat d’écoute et de parole libre.
Un grand merci à Charles Robinson pour ce moment, et à toutes les personnes présentes pour leurs prises de parole et leur curiosité.